Crevette : le scénario du pire se confirme

(Photo Jean St-Pierre, Macotenord.com)

Ce que tous craignaient se confirme : les quotas de crevette seront passablement diminués pour la prochaine saison.

C’est ce qui ressort de la rencontre du Comité consultatif sur la crevette qui s’est réuni la semaine dernière à Québec afin de discuter des relevés scientifiques et des différents scénarios mis sur la table par Pêches et Océans Canada.

Selon ce qui est évoqué, le scénario ressemblerait à environ 325 tonnes pour la zone Sept-Îles, 240 tonnes pour Anticosti, 50 tonnes pour Esquiman. Cependant, aucune évaluation n’est disponible pour l’Estuaire, par manque de données scientifiques.

Les pêcheurs québécois doivent s’attendre au pire, selon l’Office des pêcheurs de crevette du Québec.

« On a plus ou moins confirmé les chiffres qu’on avait précédemment. Il n’y a aucun chiffre pour la zone Estuaire. Avec la baisse dans les autres zones, l’Estuaire va devenir la zone la plus importante pour les pêcheurs québécois même si historiquement, c’est la plus petite zone de pêches. Dépendamment de la décision de la ministre, on risque de se retrouver avec un quota pour les pêcheurs québécois incluant les Premières nations entre 0 et 1300 tonnes. Quand on pense qu’il y a des pêcheurs qui avaient en 2015 des quotas de 500 ou 600 tonnes, ça vous donne une ampleur de la baisse ou de la catastrophe », lance sans hésiter le directeur de l’office, Patrice Element.  

« 1200 tonnes, ce n’est pas assez pour faire vivre une flotte de 35 ou 40 crevettiers. On parle d’une poignée de pêcheurs qui pourront aller à la pêche, si c’est possible de les répartir entre les pêcheurs. Est-ce qu’une usine de transformation voudra ouvrir ? Quand on parle de 1000 tonnes, c’est deux millions de livres. L’an dernier qui n’était pas une bonne année, les trois transformateurs ont fait 15 millions de livres. Si on recule il y 10 ans, chacune des usines québécoises faisait ça 13-14-15 millions de livres », explique M. Element.

« La question se pose : est-ce que les pêcheurs pourront aller à la pêche ? Est-ce que les transformateurs vont pouvoir ouvrir leur usine ? C’est la question », avance le directeur. Le réchauffement de l’eau, la baisse du taux d’oxygène et surtout le sébaste expliquent la diminution de la crevette.

« On ne peut pas faire grand-chose avec la température de l’eau ou la baisse d’oxygène. Mais on peut avoir un contrôle sur le sébaste. Il faut qu’on commence à pêcher ce poisson au plus vite », suggère fortement M. Element.

Le comité s’était concentré sur la crevette, mais tous avaient en tête le retour de la pêche au sébaste.

Devant les constats actuels, il est peu probable de voir un rétablissement des stocks dans les prochaines années.

« À moyen terme, s’il y a moins de sébaste, peut-être que la biomasse de la crevette va se rétablir. Ces petits animaux sont très résilients et peut-être que la crevette pourra se rétablir. Le sébaste va être là l’an prochain même si on commence à le pêcher, l’eau va rester chaude et l’oxygène va rester bas. Non, il n’y a pas de rétablissement à court terme », convient M. Element.

Devant ces faits, il faudra du support pour l’industrie et aussi les communautés qui seront touchées dans l’Est du Canada.

À 1000 tonnes, est-ce qu’un moratoire serait à propos ?

« Personne dans l’industrie et pas grand monde au gouvernement fédéral qui veulent envisager un moratoire car on tombe dans des complexités administratives et on ne pêchera pas durant une longue période. C’est difficile de répondre sincèrement à cette question, mais avec un quota à 500 tonnes ou 1000 tonnes, il y a plusieurs personnes qui se poseront la question que vous posez », répond M. Element à la question.

Une réponse rapide est espérée de la ministre des Pêches et des Océans, Diane Lebouthillier. Pour sa part, celle qui est aussi députée de Gaspésie-Les Îles-de-la-Madeleine a fait parvenir une déclaration écrite mercredi dernier.

« J’ai pu prendre connaissance du plus récent avis scientifique sur l’état des stocks de crevette dans l’estuaire et le golfe du Saint-Laurent, présenté lors de la réunion du comité consultatif à Québec. Les conclusions sont claires et préoccupantes : trois des quatre stocks de crevette de la région se situent présentement dans la zone critique, et seulement 38% du quota total a été pêché cette année », écrit-elle.

Elle mentionne qu’aucune surprise n’apparait dans le constat présenté et permet de passer aux prochaines étapes. 

« Au cours des prochaines semaines, le MPO finalisera l’analyse de toutes les données scientifiques, les commentaires de l’industrie et les impacts économiques des différents scénarios avant de déposer une recommandation sur mon bureau d’ici le mois de décembre », poursuit la ministre.

Elle annonce que le plan de match sera déposé au plus tard au retour des Fêtes, en janvier et gardera contact avec l’industrie dans l’attente de sa décision, ainsi qu’avec tous les paliers de gouvernement.  

Collaboration Nelson Sergerie – Magaspésie.ca