
Le potentiel de développement de parcs éoliens extracôtiers existe au Canada, mais le gouvernement fédéral devra revoir sa réglementation pour favoriser son développement.
C’est ce qu’indique le centre de recherche de Gaspé, Nergica, dans un mémoire portant sur cet enjeu présenté mardi. Le document révèle notamment que le potentiel de tels parcs se trouve dans les régions de l’Atlantique, du Pacifique et des Grands lacs.
Il est estimé à 9321 gigawatts (9 321 000 mégawatts) ce qui aiderait le Canada à atteindre son objectif de carboneutralité d’ici 2050.
« Il est extrêmement prometteur et devrait être à notre avis considéré comme une solution pour augmenter la capacité de production. Oui, il faut miser sur l’efficacité énergétique et la sobriété énergétique, mais pour atteindre l’objectif de carboneutralité d’ici 2050, on devra produire plus d’électricité renouvelable au Canada et au Québec et dans ce contexte, l’éolien extracôtier doit être considéré avec sérieux », avance le directeur général de Nergica, Frédéric Côté.
Le plus récent scénario de carboneutralité produit par la Régie de l’énergie du Canada indique que la demande d’électricité augmentera de 135 % de 2021 à 2050.
En Europe, ce type de production d’énergie est déjà bien implanté et les États-Unis sont maintenant engagés dans cette voie avec la construction du plus grand parc éolien extracôtier à New Bedford, situé à environ 50 kilomètres au sud de la péninsule de Cape Cod. Une fois complété, ce parc contiendra 62 éoliennes et produira 800 mégawatts d’électricité, suffisamment d’énergie pour répondre aux besoins en électricité de plus de 400 000 maisons et entreprises au Massachusetts.
« Même si on fait beaucoup d’effort, il faudra produire vraiment davantage. Au Québec, juste pour répondre aux besoins de la carboneutralité – je ne vous parle pas des projets de croissance économique – on a des études produites pour le ministère de l’Environnement et de la Lutte aux changements climatiques. L’image frappe : c’est environ l’équivalent d’un demi Hydro-Québec de plus ! On parle de plus de 100 térawatts/heure qu’on a besoin. C’est majeur. On doit regarder toutes les sources d’énergie renouvelable à notre disposition », soutient M. Côté.
Il rappelle que le Québec a développé une expertise depuis 20 ans en énergie éolienne et les entreprises peuvent se positionner pour l’éolien extracôtier.
Le fait que le Canada ne soit pas encore rendu à cette étape ne signifie pas un retard dans ce développement
« C’est parce que les opportunités sont différentes chez nous. En Europe, ils se sont tournés vers l’éolien en mer car ils ont été confrontés à un accès au territoire : la capacité d’installer des éoliennes sur terre avec la densité de population est difficile. Nous, on n’a pas ce défi. Aux États-Unis, c’est arrivé plus tardivement. On voit aussi que ça se développe même s’il y a un projet au large de Cape Cod, le boom du côté américain est plus récent, on parle de 18 à 24 mois. Ici, c’est le temps de se poser la question devant les besoins », analyse le directeur.
Ottawa est donc interpellé afin de poursuivre son leadership en la matière et ajuster les règles du jeu.
« On se doute bien que de construire des parcs éoliens en mer, ça interpelle plusieurs juridictions, parfois même un partage de compétences entre le fédéral et le provincial. On a besoin de se mettre à jour », dit-il.
Le mandat de l’Office extracôtier de Terre-Neuve-et-Labrador qui gère les projets de forage en mer est élargi pour ajouter le volet des énergies renouvelables.
« C’est un développement qui se passe maintenant et c’est le moment de se positionner dans cette industrie émergeante, sachant qu’on est au point de faire des choix énergétiques pour atteindre la carboneutralité d’ici 2050 », poursuit M. Côté.
Des études plus poussées devront être faites pour déterminer le potentiel, en incluant les côtes du Québec et des Îles-de-la-Madeleine.
« Reste à voir si c’est un potentiel exploitable de la bonne façon », indique le directeur.
La Nouvelle-Écosse est en avance à ce chapitre qui a annoncé son intention de déployer 5000 mégawatts au large de ses côtes en plus de développer l’hydrogène vert.
L’horizon est 2035 pour le développement, mais le projet pourrait être accéléré.
« 2030 est même une date charnière alors que le Canada veut cesser de recourir au charbon pour la production d’électricité. La Nouvelle-Écosse est prise avec le charbon. C’est une priorité pour eux de trouver des alternatives afin de rencontrer les normes canadiennes à cet égard », précise M. Côté qui mentionne que la province fait preuve de leadership en la matière.
« Les provinces atlantiques sont en train de se positionner et il serait intéressant qu’au Québec, on puisse se pencher sur cette opportunité. On a déjà des entreprises actives dans le domaine qui pourraient développer davantage cette filière. »
Le mémoire déposé suggère quatre axes : définir clairement les exigences réglementaires pour les projets éoliens extracôtiers ; favoriser une collaboration active avec les partenaires internationaux de l’industrie éolienne extracôtière ; encourager et soutenir les projets de développement éolien extracôtier au Canada et soutenir la recherche et le développement.
Collaboration Nelson Sergerie – Magaspesie.ca