PHOTOS | L’Apollo en mauvais état avait heurté le quai en raison du bris d’un fil

Source: BST - Bris suite à la collision en mars 2019.

Le Bureau de la sécurité des transports a complété son enquête en lien avec un événement survenu au port de Matane en mars 2019 lors duquel le traversier Apollo avait percuté une structure du quai.

L’organisme fédéral en vient à la conclusion que le propulseur d’étrave du navire était inopérable en raison de la rupture d’un fil électrique, une pièce pourtant importante pour réaliser une manœuvre d’accostage dans des conditions difficiles.

Lors de la traversée du 16 mars 2019, la mer était particulièrement agitée alors qu’il y avait de forts vents, 94 personnes se trouvaient à bord de l’Apollo.

Au moment de préparer son entrée dans le port de Matane, le capitaine du navire avait activé un bouton pour transférer les commandes du propulseur d’étrave à partir de la passerelle, mais aucun transfert n’a eu lieu en raison d’un fil électrique cassé.

Le capitaine a donc tenté une approche en actionnant les commandes du propulseur d’étrave depuis la passerelle sans savoir que celles-ci ne répondaient pas. Malgré plusieurs tentatives pour garder le contrôle de l’approche, le navire avait percuté le quai de Matane avant de finalement être amarré.

Figure 3. Manœuvre prévue de l’Apollo (ligne pointillée) et manœuvre enregistrée (ligne pleine) durant l’événement à l’étude, avec les heures indiquées (Source : Google Earth, avec annotations du BST)

Dans son rapport le BST affirme que la mise en service de l’Apollo comme traversier sur la route Matane–Baie-Comeau–Godbout comportait un certain nombre de risques pour sa sécurité.

« Poussée par les pressions pour rétablir le service de traversier et considérant que l’Apollo serait un navire temporaire destiné à une utilisation à court terme, la STQ a mis le navire en service sans effectuer un repérage adéquat des dangers ni une évaluation des risques connexes. Même si les risques liés au propulseur d’étrave de l’Apollo étaient connus, aucune mesure d’atténuation officielle n’a été mise en œuvre »

Extrait du rapport

Rappelons que l’Apollo avait acheté dans l’urgence au coût de 2,1 millions de dollars sans aucune inspection. Comme il est possible de le dénoter à l’intérieur du rapport du BST, la STQ s’était basée sur le fait que le navire, toujours en exploitation, détenait les certifications appropriées. Malgré tout, la STQ avait dû débourser près de 1,5 million pour de travaux correctifs suite à l’achat.

Le fil des événements retenu par le BST met également en lumière le fait que des membres d’équipage de la STQ affectés à son voyage de livraison avaient relevé plusieurs inquiétudes quant à l’état de l’Apollo si bien qu’à leur avis son exploitation représentait un danger.

Les officiers supérieurs ont affirmé à la gestion de la STQ que d’importantes réparations devaient être apportées au navire avant que celui-ci puisse traverser régulièrement le fleuve Saint-Laurent. Ils ont recommandé d’abandonner son achat en raison de son état.

De plus, Bureau Veritas avait certifié le navire pour son voyage de livraison même s’il présentait des problèmes d’étanchéité à l’eau et que ses systèmes de détection, d’alarme et d’extinction d’incendie n’étaient pas fiables.

Les enquêteurs du BST remettent d’ailleurs en question l’importance d’encadrer ces processus d’inspection et de certification affirmant que si la surveillance exercée par Transport Canada à l’égard des organismes reconnus qui effectuent des travaux dans le cadre du Programme de délégation des inspections obligatoires est inefficace, des navires en mauvais état de navigabilité risquent d’être certifiés et exploités.

Photos tirées du rapport du BST

Bouton de la console d’aileron de passerelle tribord, à gauche, et ensemble du bouton et fil électrique cassé, à droite (Source : BST)
Le moteur principal tribord était strié par des résidus huileux et un certain nombre de composants électriques étaient recouverts de sacs en plastique destinés à les protéger contre des fuites d’huile et d’eau. Sur l’un des côtés du moteur, on avait fixé un récipient de plastique doté d’un tuyau afin de rediriger les fuites d’huile vers les fonds. (Source : BST)
Conduite d’eau de mer réparée au moyen d’un conduit en caoutchouc (Source : BST)
Eau fuyant dans l’escalier du pont 2 avec une image en médaillon montrant un trou dans le même escalier (Source : BST)
Interrupteurs et voyants inutiles dans la salle de commande des machines (Source : BST)

Enfin, les analyses du BST ont révélé que certaines des conditions dangereuses relevées à bord du navire étaient présentes depuis longtemps, celles-ci s’y étant produites ou perpétuées sous la gestion de son propriétaire précédent. Voici certaines des conditions cernées :

  • perforations par corrosion dans le collecteur d’incendie;
  • dalot perforé par la corrosion exposant le pont-garage aux intempéries;
  • fuites d’huile multiples sur le moteur principal tribord en raison d’un mauvais entretien des moteurs principaux au fil du temps;
  • portes étanches à l’eau fuyant en raison de joints de caoutchouc détériorés et de cadres rouillés;
  • registres coupe-feu qui n’étaient plus étanches à l’air en raison de joints de caoutchouc détériorés et de structures rouillées;
  • brèche du bordé de muraille de la visière d’étrave;
  • cadres de fenêtre d’aluminium corrodés, sous le point d’envahissement, faisant en sorte que les fenêtres n’étaient plus fixées adéquatement à la superstructure du navire;
  • réparation temporaire d’une fissure sur la superstructure avec une tôle superposée qui s’est également fissurée et qui a rouillé;
  • perforation par corrosion des bâtis d’extrémité des refroidisseurs intermédiaires des moteurs diesels auxiliaires;
  • usure considérable des guindeaux et des treuils d’amarrage;
  • ventilateurs d’aspiration du pont-garage corrodés qui ne fonctionnaient plus en raison de leur détérioration.