
En ce mois de l’histoire des Noirs, une jeune femme de 28 ans de la Côte-Nord publie un documentaire pour exprimer sa différence étant Métisse et Innue dans la peau d’une noire.
Stéphane Tremblay, Initiative de journalisme local, Macôtenord.com
Née d’une mère innue, sur la Côte-Nord, et d’un père du Tchad, en Afrique Centrale, Gaëlle Mollen a produit le documentaire Pinatakushkuess, qui signifie petite fille noire selon les aînés.
«Les gens disent que j’ai les yeux et le front de ma mère, le reste vient de mon père», lance-t-elle en ouverture de cet impressionnant récit.
Elle raconte comment ça n’a pas été facile de grandir en Minganie, différente physiquement, la seule petite fille de couleur dans la communauté.
«Je savais que j’étais différente. Les autres enfants me le rappelaient constamment. C’est peut-être de là qu’est née mon envie de partir.»
Au volant de sa voiture, elle sillonne la route 138 admirant les paysages, contemplée par les sapins et l’eau, des richesses naturelles qui marquent le territoire de ses ancêtres.
«À l’âge de six ans je pouvais épeler le mot université grâce à ma mère. Je lui ai fait la promesse de suivre ses traces et de lui faire honneur à travers mes études», livre celle qui a tenu parole étant devenue anthropologue de formation.
Sa mère, Yvette Mollen, est effectivement un modèle pour la communauté innue de Mingan, près de Havre-Saint-Pierre.
Ayant étudié à l’Université du Québec à Chicoutimi et à l’Université de Montréal en enseignement en milieu amérindien, en intervention éducative et en études françaises et mené des recherches de maîtrise auprès de jeunes Innus, Yvette Mollen réalise maintenant son rêve de se consacrer à l’enseignement de la langue innue venant d’être nommée professeure invitée à la Faculté des arts et des sciences à l’Université de Montréal.
«Ma mère est pour moi un modèle de force et d’inspiration», livre sa fille dans le court-métrage.
Africaine et fière aussi
Aventurière, Gaëlle a toujours voulu partir à la découverte des autres cultures en voyageant.
Son premier voyage en Afrique était pour se découvrir elle-même. «Voir mon autre moitié.»
Lorsqu’elle a mis un pied au sol à la sortie de l’avion, elle se souvient d’avoir embrassé la terre. Une connexion presque mythique. «J’ai ressenti un profond sentiment d’être africaine.»
La jeune femme raconte aussi la rencontre avec ses sœurs et frères noirs. «C’est un drôle de sentiment de savoir que son sang coule aussi loin.»
Malgré ses moments de réjouissance, elle mentionne ne jamais avoir oublié ses origines et admet que sa propre identité a été difficile à trouver.
«Je me suis longtemps cherchée. Je crois que c’est pour ça que j’ai toujours eu envie de partir».
Aujourd’hui, elle a trouvé. «J’étais une jeune fille au cœur nomade qui cherchait sa place. Aujourd’hui, je suis fière d’être Innue et aussi Tchadienne.»
Dans ce documentaire de près de cinq minutes très bien montées sous une musique autochtone, Gaëlle Mollen s’adresse à ses progénitures.
«Toi mon enfant à venir, je veux que tu saches que c’est une richesse d’être différent. Crois en toi-même et en la beauté de tes rêves.»
«La vie est tellement belle, plus que l’on croit. Être en symbiose avec toi-même est le plus beau cadeau que tu peux te faire. Je serai toujours là pour toi mon enfant métisse.»
Bien que Gaëlle soit encore une jeune femme vouée à une brillante carrière, elle s’exprime comme un grand sage en rappelant que parfois la vie nous oblige à traverser des épreuves, mais que «la pluie est nécessaire pour enfin voir le soleil.»